Randonneurs au château de Bourscheid
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The Good Life Se détendre en randonnant

4 minutes

Les pique-niqueurs

Chaque week-end, ils explorent un autre joyau de leur pays d’origine: les Luxembourgeois Ralph Kass et Daniel Irrthum ont décidé de découvrir tous les circuits de randonnée du Grand-Duché – pique-niques inclus. C’est le confinement de 2020 et la pandémie qui leur ont donné cette idée. Et ce fut le coup d’envoi d’un beau voyage de découverte qui se poursuit encore aujourd’hui.

Qui sont-ils, ces deux-là ? D’où viennent-ils ? Soudain, ils sont apparus sur les réseaux sociaux. Deux hommes minces aux cheveux courts, deux barbus à lunettes, qui se ressemblent un peu l’un l’autre. Et toujours ces photos d’eux, devant les endroits les plus beaux, jamais sans une scène de pique-nique. Avec une nappe, du pain, du raisin et plein d’autres bonnes choses. 

Ralph et Daniel aiment tout simplement célébrer et mettre en scène leurs promenades. Bien que le mot « promenade » soit peut-être un euphémisme. Mais le mot « randonnée » semble un peu fatigant, renvoyant à la suractivité et au dépassement de soi. Le mot promenade évoque plutôt l’oisiveté. Le regard qui vagabonde de droite à gauche et qui saisit un peu tout. Le promeneur profite. Et c’est justement ce que l’on voit et lit dans leurs posts sur Internet.

Bourscheid Randonner
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Nouveaux lieux préférés

Ils ont parcouru presque toute la planète. Des voyages ? Ils n’en avaient jamais assez et ce n’était jamais assez loin. Mais la pandémie de COVID-19 est arrivée. Les virées lointaines sont devenues tout à coup impossibles. On ne pouvait même plus passer les frontières proches. « Oui, et alors on s’est dit : on ne peut quand même pas se laisser abattre ! Qu’est-ce qu’on peut faire ? Il faut faire quelque chose près de chez nous, dans notre pays ! », se souvient Ralph.

C’est ainsi qu’est née l’idée de faire un circuit de randonnée tous les dimanches, de s’essayer à un « autopédestre » au Luxembourg. Cette idée s’est transformée en tradition, qui a perduré après le confinement et qui est devenue une très jolie routine. Chez Daniel et Ralph, le dimanche, c’est « auto-pédestre » !

Randonner Hoscheid-Molberlee
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Ambassadeurs des circuits de randonnée

C’est sur les différents sites touristiques luxembourgeois, comme par exemple les portails des régions ou le Géoportail, qu’ils trouvent leurs promenades dominicales. Pourquoi ils aiment ces chemins ? « Parce qu’ils sont très beaux, souvent à l’écart  des plus fréquentés. Ici, on est bien plus tranquilles », dit Ralph, qui a toujours aimé être dehors et qui faisait partie des scouts par le passé.

Toujours avec eux et presque déjà culte : un pique-nique préparé avec amour et joliment présenté sur une petite nappe. « Nos amis en attendent la photo tous les weekends », dit Daniel en souriant. En effet, les deux hommes postent assidûment leurs nouveaux endroits préférés et sont ainsi devenus les ‘ambassadeurs des circuits de randonnée’ sur Instagram et Facebook. « En faisant ces promenades, ce que nous avons découvert, c’est que le Luxembourg a vraiment beaucoup à offrir ! », souligne Daniel.

L’Éislek, au nord du Luxembourg, est une région que l’on peut très bien sillonner en empruntant des circuits de randonnée. L’office régional du tourisme en recense 200 qui ont été créés ou perfectionnés ces dernières années. Les 18 plus récents, les « Éislek Pied», sont particulièrement beaux. En luxembourgeois, cela signifie les « sentiers à travers l’Éislek ». Ils ont été conçus sur des critères très stricts de la Fédération européenne de la randonnée pédestre. Et le long des « Éislek Pied », on trouve de très jolis endroits, où l’on peut laisser vagabonder son âme. Et de jolis endroits où dormir également.

Ralph et Daniel ont passé la nuit dans un chalet rustique sur le domaine de l’hôtel Dirbach Plage. « Un sentiment de déconnexion total», s’enthousiasme Ralph. Normalement, les deux hommes partent directement de chez eux, de Esch-sur-Alzette, dans le sud du pays, vers le point de départ de leurs randonnées, car le Luxembourg n’est vraiment pas très grand. Mais cette fois, nos deux randonneurs passent tout leur week-end dans le nord.

Randonnée à Bourscheid
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Pour guides : une sorcière herboriste et un détective

Après un copieux petit-déjeuner, il est temps de mettre son sac à dos et de partir ! L’un de leurs buts de la journée est le somptueux château de Bourscheid, qui semble littéralement trôner au-dessus du monde. La randonnée éponyme n’est pas facile car elle comporte d’importants dénivelés, mais elle offre aussi des points de vue inoubliables, notamment sur le château lui-même. Ses murs fortifiés ont été doublement renforcés et fascinaient en son temps le grand Victor Hugo. Une réplique de l’un de ses dessins est accrochée dans l’entrée du château.

Et c’est aussi là que nos marcheurs saluent leurs deux guides, Jutta Kanstein et Ralph Heuschen. « Je suis Els von Burscheid, la sorcière des herbes, et Ralph est Sherlock Holmes », dit Jutta avec un sourire malicieux. Avec ses vêtements d’un autre temps, elle ramène les visiteurs vers le 19e siècle. Elle et Ralph incarnent deux personnages de fiction qui, ensemble, tentent de résoudre les énigmes du château de Bourscheid, entre autres l’histoire des billets de banque douteux qui auraient été imprimés au château.

Grâce à leur bonne connaissance du site, de la flore et de la géologie de la région, Jutta et Ralph savent fasciner leurs hôtes. « Ici, dans ces buissons d’épines, les assaillants sont restés coincés, entre les murs par rangées ! », raconte Jutta Kanstein. Puis Daniel et Ralph apprennent qu’autrefois, les fleurs de molène étaient trempées dans de la cire ou de la poix et elles servaient de torches. Pour finir, Jutta montre à nos deux messieurs les « carottes sauvages » qui poussent entre les murs, une herbe sauvage dont on peut manger la racine et dont le goût rappelle en effet la carotte. Savouré dans la cour du château, le pique-nique composé de saucisson de gibier, de jambon des Ardennes et de bière de Bourscheid n’en est que meilleur.

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Des vues à couper le souffle

Après avoir repris des forces, la randonnée difficile de la crête de Molberlee, au coeur de la région Éislek, semble réalisable. Cette colline, bordée de mûriers qui ont donné le nom de Molberlee, est définitivement un point culminant de l’Éislek. À gauche et à droite de l’étroite crête, les versants tombent à pic et révèlent le paysage accidenté des Ardennes luxembourgeoises. Ici, il faut faire bien attention et avoir le pied sûr. Il souffle un vent léger, les herbes et les arbustes se balancent doucement.

Des balades légendaires

Montrer aux gens que l’on peut apprécier pleinement la nature, avec conscience, et que les randonnées ne doivent pas nécessairement être des performances sportives de haut niveau, c’est important pour les deux guides que sont Jutta et Ralph. Voilà pourquoi ils proposent leurs circuits sous forme de « forfaits expérience », avec plein d’histoires et de légendes.

Cela comprend, par exemple, une visite de Schlindermanderscheid, un village en contrebas de la Molberlee. Ce village apparaît dans le deuxième chant de la fable luxembourgeoise « De Renert », de l’écrivain Michel Rodange. Fidèle à elle-même et à son propre style, Jutta sort les paroles de ce chant, ici, sur les rochers, et se met à déclamer le poème devant la forêt et le fameux village.

Un renard en queue de pie, qui se défie des lois et des principes moraux, où pourrait-il être mieux accueilli que dans cette région un peu sauvage ? Là, dans l’Éislek, où Jutta récite ce poème, on aime ce qui est fumé, épicé et rustique.

Comme le saucisson de gibier du pique-nique au château de Bourscheid. Daniel et Ralph en ramèneront certainement avec eux pour leurs prochaines balades du dimanche.

Picknickers Bourscheid
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